Cultiver l'engagement
C’est en 1970 (« Motivation and Personality ») qu’Abraham Maslow dévoile la version la plus aboutie de sa théorie sur la motivation et l’expression des besoins humains. 5 catégories sont identifiées et selon ses études, l’accomplissement d’une catégorie entraine le besoin de passer à la suivante. Même si aujourd’hui, l’aspect hiérarchique de cette pyramide est remis en cause au profit d’un mélange plus subtile entre les différents besoins, cette représentation reste très pertinente si on l’associe à une vision de l’engagement des collaborateurs au sein d’une organisation.
Et au travail quels sont nos besoins ?
Pour aller plus loin, il est possible de mettre en parallèle un vrai constat entre cette pyramide ? reflet de l’individu et le monde de l’entreprise :
Selon les besoins satisfaits on retrouve les attitudes suivantes et c’est l’endroit où l’on se positionne dans la pyramide, et donc la somme des besoins satisfaits, qui crée l’engagement :
Paradoxalement et de manière générale, un nouvel entrant dans une organisation à tendance à arriver en haut de cette pyramide. Il est donc important de comprendre ce qui, au fil du temps, lui fait descendre l’échelle de motivation et pourquoi l’entreprise se transforme en machine à « déssatisfaire » les besoins de ses membres. L’étude Gallup de 2013 (« State of the Global Workplace: employee engagement insights for business leaders worldwide » http://www.gallup.com) nous permet de bien identifier le niveau de désengagement dans les entreprises françaises (cf graphique ci-dessous)
Imaginez que l’organisation soit un bateau, dans celui-ci 9 personnes rament pour avancer, 26 rament en sens inverse et 65 ne rament pas. Notre bateau, si beau soit-il, n’ira pas très loin dans ces conditions et il n’ira surtout pas dans la direction où il était supposé aller.
Engagez-vous, engagez-vous …
L’engagement ou le désengagement sont des états contagieux. Ainsi si on n’y fait pas attention l’entreprise peut rapidement se transformer en un formidable outil de démotivation. Il apparaît clairement que les managers, quels qu’ils soient, doivent toujours se situer dans la catégorie « Hautement Engagé », celle dans laquelle l’accomplissement personnel passe par le besoin de transmettre, d’aider les autres à s’accomplir et donc à atteindre à leur tour le niveau le plus haut de la pyramide. Mais attention atteindre le sommet ne veut pas dire y rester, selon Maslow, la perte d’un des besoins de niveau inférieur entraîne le passage en priorité haute de la reconquête de celui-ci et donc potentiellement la dégradation de l’engagement du collaborateur.
Isaac Getz, dans son livre « Liberté & Compagnie » introduit de nouveaux besoins et une nouvelle articulation de ceux-ci. Pour lui il n’y a pas de méthode universelle pour libérer une entreprise et rendre les salariés heureux, en revanche il y a des éléments qui, absents, feront échouer toute tentative.
- Egalité : l’ensemble des salariés doit être traité de manière égale avec considération, respect, bienveillance et confiance.
- Développement personnel : Chaque salarié doit pouvoir se développer et acquérir de nouvelles connaissances dans son travail.
- Autodirection : Chaque employé doit être traité en être responsable et doit pouvoir gérer lui-même ce qu’il a à faire au sein de l’entreprise, guidé par la vision et les valeurs de celle-ci.
Ces piliers indissociables agissent au fond sur les trois derniers étages de la pyramide de Maslow, considérant sans doute que les deux premiers (salaire et sécurité) sont le minimum pour une entreprise qui souhaite prospérer et s’engager sur le chemin de la bienveillance.
Le système de management de type « Commandement & Contrôle » massivement répandu en France et consistant à dire aux salariés quoi faire et à vérifier qu’ils ont bien fait ce qu’on leur a demandé avec la méthode qu’on leur a imposée détruit quasiment de fait les trois derniers étages de la pyramide de Maslow appliquée au monde du travail et raye de la carte les trois besoins fondamentaux décrits par Isaac Getz. Dans ces conditions, on comprend mieux les résultats de l’étude Gallup précédemment citée.
Prendre en compte les besoins de ses équipes et les satisfaire est impératif pour un manager. Etre conscient des besoins fondamentaux est une clé pour obtenir un engagement fort de ses équipes. De nos jours le rôle du manager doit être celui d’un leader à l’écoute et en mesure de placer tout le monde dans les meilleures conditions pour s’accomplir et par ricochet faire que l’entreprise croisse et prospère.
Le management est donc une discipline extrêmement compliquée qui doit se réinventer en permanence en fonction de la personnalité mais aussi de l’état d’esprit des managés à un instant T. C’est en cela qu’elle est sans doute une des activités les plus passionnante du monde du travail.